Sautillant sur place pour se réchauffer, Derek jeta un regard au thermomètre en bois et cuivre accroché en dessous de l'enseigne ouvragée d'un apothicaire. Ce dernier n'affichait que six degrés, ce qui faisait de ce mois de septembre l'un des plus froids depuis 1956. Se frottant les mains, l'ancien orvet attendait avec fébrilité l'ouverture de la boutique. Nerio étant rentré de Croatie avec une infection respiratoire monumentale, Derek s'était proposé de chercher de quoi le remettre sur pied. Une semaine de potion aux herbes médicinales et il n'y paraîtrait plus ! Seulement, le commerçant était en pause déjeuner. Alors le brun patientait, en observant les passants.
Malgré le froid cuisant, les pubs du chemin de traverse étaient bondés, les pas de porte pris d'assaut par des employés profitant de la fin de leur pause. Des écoliers faisaient les derniers achats, en vue de la ré-ouverture prochaine de Poudlard. Des femmes aux airs pincés et aux mines affairées sortaient de chez Guipure, les bras chargés de paquets. Et un peu plus loin, dans une indifférence toute relative, parqués dans un enclos constitué de barrières magiques mobiles, une quinzaine de manifestants défiaient une cohorte de sorciers de la brigade de police magique.
Le leader du mouvement consultait frénétiquement sa montre en serrant les dents. De nombreux autres frappaient leurs gants l'un contre l'autre pour combattre le froid mordant. A l'arrière du groupe, un trio de jeunes filles se bousculaient en riant et en poussant des couinements pathétiques. Sur les épaules de son père un petit garçon, âgé d'environ trois ans , agitait de petits fanions.
A l'évidence, ils étaient tous là pour protester contre les décisions du Ministère. Derek fronça les sourcils. Il y avait vraiment peu de monde, comparé aux précédentes manifestations. Un vieil homme en veste de tweed s'arrêta à hauteur du brun, bouteille de vin de cerise à la main. Il observa un instant le minuscule cortège puis claqua la langue d'un air réprobateur avant de prendre Derek à parti :
Le Ministère a mangé son pain blanc, vous savez. Il ne peut pas sentir la colère qui enfle dans les rues. Bientôt la révolution éclatera. Dans un mois, dans un an, qui sait ? déclara t'il en haussant les épaules.
Derek fixa le petit groupe en se demandant comment quinze personnes pourraient changer radicalement le monde. Néanmoins, soucieux de ne pas contrarier le vieillard, il hocha la tête. Après avoir bû une gorgée de sa piquette, l'ancien tourna les talons et se dirigea vers une femme qui sortait de chez Wiseacres, une boîte de fioles ouvragées dans les mains.
Le chasseur de fantôme se gratta pensivement le menton. Peut-être que le vieux avait raison. Ou peut-être que l'ampleur du mouvement social qui avait agité le monde sorcier les derniers mois était de l'histoire ancienne. S’adossant contre la devanture, lui restant cinq minutes à tirer avant l'ouverture de l'officine, Derek rabattit sa capuche et en serra solidement la cordelette de façon à ce que l'encolure de son veston recouvre la quasi-totalité de son visage et le protège du froid.
Soudain, les agents de la brigade magique écartèrent les barrières, puis l'un deux brailla à plein poumons :
Le cortège devait se mettre en marche à 13 h 45. Nous vous avons accordé 15 minutes pour vous rassembler. Toute personne qui demeurera derrière les barrières sera appréhender pour entrave à la circulation. Allez tout le monde se bouge. Le leader cracha sur la chaussée puis se tourna vers ses maigres troupes.
Vous avez entendu ce sac à bouses de dragon ? Allez, on y va. Le flash du photographe de la Gazette des Sorciers illumina à plusieurs reprises le petit groupe de manifestants qui se mettaient en marche, encadrés par un cordon de brigadiers. Ces derniers, constant l'échec de l'appel à la grève, échangeaient des sourires amusés et des regards condescendants.
Les passants observaient la manifestation avec curiosité, comme s'il s'agissait d'un spectacle de rue. Derek remarqua néanmoins sur les trottoirs plusieurs individus affichant des signes extérieurs de soutien à la cause des militants. Plusieurs d'entres eux se mêlèrent au défilé. D'autres le suivaient à distance respectable.
Finalement, ce rassemblement cachait peut-être une autre réalité que celle qu'il laissait présager de prime abord.
- Spoiler:
Coucou !Je vous explique juste mon idée. En gros, pour le moment , il n'y a pas beaucoup de manifestants, mais c'est un fait exprès. Au fur et à mesure que la manifestation va avancer, il va en sortir de partout qui vont venir grossir les troupes jusqu'à attendre un nombre conséquent ( 200-300 personnes). C'était un choix stratégique de l'organisateur pour que la brigade magique soit en infériorité ... GG les potteriens !